8.3.5 Agents anti-vitamine K

Dans les années 1920, des hémorragies massives parmi le cheptel ayant mangé du foin moisi avaient mis sur la piste de la warfarine. D’abord utilisée comme mort-aux-rats, celle-ci a ensuite été adaptée à l’usage clinique chez l’homme comme anticoagulant oral (Coumadine®). Les coumarines comme la phénprocoumone (Marcoumar®) ou l’acénocoumarol (Sintrom®) sont utilisées depuis les années cinquante (voir Tableaux 8.1, 8.2, 8.3, 8.11 et 8.12). 
 
Les anti-vitamine K (AVK) agissent en bloquant la synthèse hépatique des facteurs dépendant de cette vitamine: facteurs II (prothrombine), VII, IX et X, protéine C et S (voir Figure 8.9). En début de traitement, la déplétion en protéine C et S est plus rapide que celle en facteurs de coagulation, ce qui induit passagèrement un état hypercoagulable, puisque ces deux protéines ont un effet inhibiteur sur la cascade coagulatoire [1]. La demi-vie est de 8-11 heures pour le Sintrom® et 90-160 heures pour le Marcoumar®. Etant principalement éliminés par voie hépatique, ces médicaments sont peu influencés par la fonction rénale. La dose initiale est 5-10 mg par jour, réglée ensuite sur la réponse de l’INR. Chez les personnes âgées, il est judicieux de rester < 5 mg/j [2]. L’incidence des saignements sous AVK varie de 0.5% à 3.4% par an selon les études, en fonction de l’INR recherché [5].
 
Bien qu’ils soient utilisés depuis une soixantaine d’années, les agents anti-vitamine K présentent des inconvénients majeurs [4,6].
 
  • La réponse est lente; le pic d’action est atteint après plusieurs jours (4 jours pour le Sintrom, 7 jours pour le Marcoumar); lors de thrombo-embolie veineuse, l’AVK est débuté pendant les 2-5 premiers jours de traitement héparinique intraveineux. 
  • Le traitement nécessite une surveillance continue par l’INR / TP. 
  • La marge thérapeutique est étroite; l’INR thérapeutique est situé entre 2.0 et 3.0. Or la réponse individuelle est très variable pour plusieurs raisons: polymorphisme génétique et ethnique important, forte liaison à certains aliments, fluctuations dans l’ingestion de vitamine K, interaction avec de nombreux autres médicaments.
    • Potentialisation: antifungiques azole, céphalosporines, érythromycine, amoxicilline, amiodarone, diltiazem, clofibrate, fluvastatine, simvastatine, phénylbutazone, cimétidine, oméprazole, acétaminophène, alcool, AINS.
    • Inhibition: rifampicine, barbiturés, carbamazépine, azathioprine.
Lors d’interruption préopératoire, le délai pour que l’INR soit ≤ 1.5 est en moyenne de 5 jours, mais il varie considérablement selon les patients en fonction de la dose d’entretien, de la fonction hépatique, de l’alimentation et des médications concomitantes. La routine est d’interrompre les AVK 5 jours avant la chirurgie et de les reprendre le premier jour postopératoire (voir Chirurgie chez malades anticoagulés) [3]. Comme on ne peut pas laisser les patients aussi longtemps sans anticoagulation, il est recommandé d’assurer une substitution momentanée par une héparine (voir Substitution).
 
 
 Agents anti-vitamine K
Les AVK bloquent la synthèse hépatique des facteurs dépendant de la vitamine K: facteurs II (prothrombine), VII, IX et X, protéine C et S. Le le pic d’action est atteint après plusieurs jours (4 jours pour le Sintrom®, 7 jours pour le Marcoumar®) ; la demi-vie est longue : 11 heures pour le Sintrom®, 40 heures pour la Coumadine® et 140 heures pour le Marcoumar®. La réponse est très variable individuellement, d’où la nécessité de monitorer régulièrement le TP/INR (niveau thérapeutique : INR 2.5-3.0). Dose initiale : 5-10 mg/j ; entretien : 2-5 mg/j. 
 
Lors d’interruption préopératoire, le délai pour que l’INR soit < 1.5 est en moyenne de 5 jours, mais il varie considérablement selon les patients en fonction de la dose d’entretien, de la fonction hépatique, de l’alimentation et des médications concomitantes. La routine est d’interrompre les AVK ≥ 5 jours avant la chirurgie et de les reprendre le premier jour postopératoire ; une substitution avec une héparine est en général nécessaire.


© CHASSOT PG, MARCUCCI C, Décembre 2013, dernière mise à jour, Novembre 2018
 

Références
 
  1. ADAMS RLC, BIRD RJ. Review article: Coagulation cascade and therapeutic update: Relevance to nephrology. Part I: Overview of coagulation, thrombophilia and history of anticoagulants. Nephrol 2009; 14:462-70
  2. AGENO WA, GALLUS AS, WITTKOWSKY A, et al. Oral anticoagulant therapy: Antithrombotic therapy and prevention of thrombosis, 9th ed: American College of Chest Physicians Evidence-Based Clinical Practice Guidelines. Chest 2012; 141 (Suppl 2):e44S-e88S
  3. DOUKETIS JD, BERGER PB, DUNN AS, et al. The perioperative management of antithrombotic therapy. American College of Chest Physicians Evidence-Based Clinical Practice Guidelines (8th edition). Chest 2008; 133:299S-339S
  4. HOLBROOK A, SCHULMAN S, WITT DM, et al. Evidence-based management of anticoagulant therapy. Antithrombotic therapy and prevention of thrombosis, 9th ed: American College of Chest Physicians Evidence-Based Clinical Practice Guidelines. Chest 2012; 141 (Suppl 2):e152S-e184S
  5. JACKSON SL, PETERSON GM, VIAL JH, et al. Outcomes in the management of atrial fibrillation : clinical trials results can apply in practice. Intern Med J 2001 ; 31 :329-36
  6. SINAURIDZE EI, PANTELEEV MA, ATAULLAKHANOV FI. Anticoagulant therapy: basic principles, classic approaches and recent developments. Blood Coag Fibrinol 2012; 23:482-93