25.15.3 Formation des non cardiologues

Le succès de l'ETO en anesthésie depuis 25 ans est certainement lié à la mise sur pied très précoce d'une formation adéquate pour les non-cardiologues. Les premiers cours ont débuté dans les années 1995 en Europe comme au Etats-Unis. Le premier examen d'accréditation a été mis en place en 1997 aux USA et en 2005 en Europe (voir Formation en ETO). Cette attitude a donné de solides connaissances et une grande crédibilité aux anesthésistes qui ont pratiqué la technique en chirurgie cardiaque, puis aux soins intensifs et aux urgences. D'une manière générale, la collaboration a été très fructueuse avec les services de cardiologie. L'examen ETT simplifié doit bénéficier d'un enseignement équivalent, d'autant plus que le matériel est relativement peu onéreux et que n'importe quel service hospitalier peut l'acquérir [9].

La formation de base comprend plusieurs éléments [2,8,13,14].
 
  • Cours théoriques sur la physique des ultrasons, l'anatomie cardiaque, la corrélation anatomo-échographique, les artéfacts et les différentes vues transthoraciques (6-8 heures).
  • Entraînement sous supervision sur un stimulateur ou un mannequin (6-12 heures).
  • Expérience d'un minimum de 30 examens normaux en situation réelle pour développer les capacités nécessaires à acquérir des images acceptables.
  • Expérience d'un minimum de 50 à 100 examens cliniques réalisés personnellement sous la supervision d'un praticien de formation avancée. L'échantillonnage doit représenter une palette de diagnostics correspondant aux différentes situations rencontrées dans la pratique respective d'un anesthésiste, d'un intensiviste ou d'un urgentiste. L'exposition aux différentes pathologies n'étant pas identique dans chaque spécialité, la liste des situations à résoudre doit être adaptée aux cas rencontrés dans la pratique courante de chacun. Pour l'instant, aucun document ne fixe formellement le nombre précis d'examens requis, mais la plupart des recommandations s'accordent sur le fait que ces chiffres ne sont pas suffisants pour connaître toutes les pathologies rencontrées chez les patients en état critique.
  • Accréditation sous forme d'un examen ou d'un certificat d'enseignement.
Avec ce type de formation, les participants parviennent à un accord avec l'interprétation faite par un cardiologue dans ≥ 90% des cas; les divergences portent le plus souvent sur de faux-positifs [11]. Seuls des médecins adéquatement formés doivent être habilités à pratiquer un examen ETT de dépistage. Cet enseignement devrait faire partie du cursus standard de l'assistanat dans des spécialités comme l'anesthésie, la médecine intensive et la médecine d'urgence [5]. Le niveau de compétence et d'expérience requis, qui peut varier selon les spécialités, doit être atteint avant de pouvoir pratiquer un examen seul et d'en tirer les conséquences thérapeutiques sans supervision. Le candidat doit prouver ses capacités sur plusieurs plans [14].
 
  • Aisance dans l'utilisation de l'échocardiographe;
  • Capacité à obtenir des vues transthoraciques standard de bonne qualité;
  • Evaluation critique des images obtenues;
  • Interprétation adéquate des images;
  • Reconnaissance des structures normales et des anomalies pathologiques;
  • Intégration des découvertes échocardiographiques à la clinique;
  • Décisions thérapeutiques prises en fonction des données échocardiographiques.
L'instance habilitée à certifier l'accréditation et le niveau de connaissance n'est pas encore clairement déterminée, mais relève en général des sociétés médicales de chaque spécialité ou des protocoles internes de chaque institution [1]. L'absence de formation adéquate présente un risque évident de diagnostics manqués, de surinterprétation d’images dans les limites de la norme ou de conclusions thérapeutiques erronées. L'examen ETT de dépistage reste un examen simplifié qui ne permet pas une évaluation approfondie des cardiopathies [10,12].

Pour aller au-delà de ce niveau de base, il faut envisager une formation avancée qui permet de procéder à un véritable examen échocardiographique transthoracique aussi bien que transoesophagien. Le réanimateur et l'intensiviste qui ont accompli cette formation supplémentaire sont habilités à procéder au lit du malade à un examen ETT ou ETO complet, avec analyse Doppler et mesures quantitatives, au même titre que l'anesthésiste spécialisé le fait en salle de chirurgie cardiaque. Ils possèdent une connaissance cardiologique suffisante pour comprendre et analyser les images produites [6,7]. Une formation adéquate implique un enseignement théorique, une pratique clinique d'examens conduits personnellement, supervisés par un spécialiste et consignés dans un logbook [7,8,9]. Diverses instances délivrent des certificats avec un niveau d'exigence variable (connaissances et nombre d'examens ETT). La réussite d’un examen confére une accréditation officielle. Le maintien des compétences est garanti par une formation continue et par une pratique d’au moins 50 examens par an [3,4,8].

 
Formation en ETT de dépistage (FoCUS echo)
Une formation est requise pour pratiquer un examen transthoracique simplifié:
    - Cours théoriques
    - Entraînement sur simulateur
    - Expérience minimale de 30 examens normaux pour avoir la capacité d'acquérir les images
    - Expérience de 50-100 examens en situation réelle, réalisés personnellement sous la
      supervision d'un aîné
    - Accréditation (examen, certificat)

Cette formation restreinte permet la pratique d'un examen minimal qui est un complément à l'examen clinique pour orienter la thérapeutique et qui ne remplace pas un examen conventionnel fait par un cardiologue.


© CHASSOT PG, VUILLE C. Avril 2019; dernière mise à jour, Mars 2020


Références
 
  1. ADLER AC, GREELEY WJ, CONLIN F, et al. Perioperative anesthesiology ultrasonographic evaluation (PAUSE): A guided approach to perioperative bedside ultrasound. J Cardiothorac Vasc Anesth 2016; 30:521-9
  2. FAGLEY RE, HANEY MF, BERAUD AS, et al. Critical care basic ultrasound learning goals for American Anesthesiology critical care trainees: Recommendations from an expert group. Anesth Analg 2015; 120:1041-53
  3. FLASCHKAMPF FA, BADANO L, DANIEL WG, et al. Recommendations for transoesophageal echocardiography: update 2010. Eur J Echocardiogr 2010; 11:557-76
  4. LANCELLOTTI P, PRICE S, EDVARDSEN T, et al. The use of echocardiography in acute cardiovascular care: Recommendations of the European Association of CardioVascular Imaging and the Acute Cardiovascular Care Association. Eur Heart J Cardiovasc Imaging 2015; 16:119-46
  5. MAHMOOD F, MATYAL R, SKUBAS N, et al. Perioerative ultrasound training in anaesthesiology. A call to action. Anesth Analg 2016; 122:1794-804
  6. MAYO PH, BEAULIEU Y, DOELKEN P, et al. American College of Chest Physicians / La Société de Réanimation de Langue Française Statement on competence in critical care ultrasonography. Chest 2009; 135:1050-60
  7. MAYO PH, VIEILLARD-BARON A, et al. International consensus statement on training standards for advanced critical care echocardiography. Intensive Care Med 2014; 40:654-66
  8. NESKOVIC A, HAGENDORFF A, LANCELLOTTI P, et al. Emergency echocardiography: the European Association of CardioVascular Imaging recommendations. Eur Heart J Cardiovasc Imaging 2013; 14:1-11
  9. POPESCU BA, ANDRADE MJ, BADANO LP, et al. European Association of Echocardiography recommendations for training, competence, and quality improvement in echocardiography. Eur J Echocardiogr 2009; 10:893-905
  10. PRICE S, VIA G, SLOTH E, et al. Echocardiography practice, training and accreditation in the intensive care: document for the World Interactive Network Focused on Critical Ultrasound (WINFOCUS). Cardiovasc Ultrasound 2008; 6:49 (1-35)
  11. ROYSE CF, HAJI DL, FARIS JG, et al. Evaluation of the interpretative skills of participants of a limited transthoracic echocardiography training course (H.A.R.T. scan course). Anaesth Intensive Care 2012; 40:498-504
  12. SICARI R, GALDERISI M, VOIGT JU, et al. The use of pocket-size imaging devices: a position statement of the European Association of Echocardiography. Eur J Echocardiogr 2011; 12:85-7
  13. SPENCER KT, KIMURA BJ, KORCARZ CE, et al. Focused cardiac ultrasound: Recommendations from the American Society of Echocardiography. J Am Soc Echocardiogr 2013; 26:567-81
  14. VIA G, HUSSAIN A, WELLS M, et al. International evidence-based Recommendations for focused cardiac ultrasound. J Am Soc Echocardiogr 2014; 27:683.e1-e33